Il était une fois…

Il y a des éditeurs qui ont le « mojo » en matière de prospection et qui accumulent les pépites à leur catalogue. Devolver Digital fait partie de ceux-là et chacune de leur conférence, outre leur mise en scène singulière, est riche d’émerveillement vidéoludique. C’est en 2022 que Plucky Squire a fait battre notre petit cœur de joueur né dans un autre millénaire. 

Le titre a fait son bonhomme de chemin, tranquillement, nous donnant parfois de ses nouvelles. Nous apprenions, tristement, qu’il prendrait son temps pour se sublimer lors d’un Devolver Direct dédié au report des productions planifiées pour 2023. Mais ce n’était que pour mieux nous surprendre avec l’annonce de sa localisation totale, une première pour l’éditeur. Il faudra désormais l’appeler Le Vaillant Petit Page et il a débarqué dans notre contrée le 17 septembre 2024. 

---

…dans un pays fort fort lointain

C’est au royaume de Mojo que le petit Laïus, page de son état, vit des jours paisibles. Entre deux grandes aventures, il s’adonne à l’écriture et conte ses exploits dont les sujets sont friands. Mais c’est sans compter sur l’obstination à faire le mal de Ragecuite, l’éternel méchant de l’histoire. Ce dernier semble cette fois persuadé d’avoir découvert un moyen de l’emporter face à Laïus, après de multiples tentatives pour le terrasser. Nous tairons, pour des raisons narratives évidentes, les motivations qui poussent ce vil antagoniste à tant de méchanceté. Néanmoins, notre héros intrigué par l’étrange orage qui s’abat sur la tour du Tome, décide d’aller voir de plus près ce que son adversaire de toujours manigance. Accompagné de Violette et de Crash, ses fidèles compagnons, il part pour en découdre à nouveau avec Ragecuite. Armé de sa plume-épée, il est prêt à griffonner autant d’épitaphes que nécessaire pour se frayer un chemin.    

Les prémices de cette aventure sont également l’occasion de se familiariser avec les mécaniques de gameplay. N’oublions pas que nous sommes dans un livre dont vous êtes le héros et que les mots ont du pouvoir. Les développeurs ont pris cela au pied de la lettre puisqu’en changeant un bout de phrase, on résout facilement les premières énigmes environnementales. Les douves se remplissent lorsque nous découvrons le mot “plein” et que nous réécrivons les annotations narratives par exemple. 

Ainsi, on arrive sans grande difficulté à rejoindre notre ennemi juré et à conclure cette aventure. Du moins, c’est ce que l’on imagine, puisque cela se termine toujours de cette manière. C’est sans compter sur la nouvelle magie dont dispose Ragecuite. Comme tout vilain qui se respecte, il prend un malin plaisir à nous exposer son plan machiavélique en détail avant de le mettre à exécution. Nous apprenons alors que nous ne sommes que les figurants d’un livre et que notre histoire fait partie d’une saga en plusieurs volumes. Après en avoir parcouru chaque page, Ragecuite s’est rendu compte qu’il était condamné à n’être que l’éternel perdant de toutes ces histoires. C’est pour cela qu’il a décidé de nous pousser littéralement hors du conte, grâce à son récent pouvoir.

Un peu étourdi par ces révélations, mais également par le passage au travers du quatrième mur, Laïus se réveille dans un monde en trois dimensions. Guidé par Barbelune le mage, il parvient à acquérir une nouvelle compétence lui permettant de feuilleter le livre dont il vient d’être expulsé. Ce que Ragecuite n’avait pas prévu, c’est que notre petit page, en entrant en contact avec sa magie, a obtenu la capacité de passer d’un univers à l’autre grâce à des portails. 

C’est là toute l’originalité du titre et, avouons-le, c’est ce qui nous a fait craquer dès sa première présentation. D’autres compétences viennent s’ajouter à cela, permettant ainsi au gameplay de sans cesse se renouveler, mais nous n’en dévoilerons pas plus pour vous laisser le plaisir de la découverte. Nous dirons juste que les développeurs ont savamment mis à profit les possibilités offertes par la rencontre de ces deux univers.  

---

Un héros à la page…

Malgré une direction artistique qui fleure bon les années 90, notre vaillant petit page n’est pas “has-been” pour autant. Il n’a en effet pas grand-chose à envier à Astrobot en termes de références glissées çà et là. Au gré de notre pérégrination, nous croisons de multiples clins d’œil à l’art sous toutes ses formes. Qu’ils proviennent du cinéma, de la peinture, de la mode, de la télévision ou du jeu vidéo, tous nous ont fait sourire tant ils sont bien amenés. On se prend même au jeu en cherchant les plus subtils.

La bande-son, elle non plus, n’a pas à rougir face aux hits du moment. Quoi de mieux qu’un morceau de métal médiéval pour gravir une montagne ferreuse ? Vous l’aurez compris, les membres du studio All Possible Futures sont tout autant décalés que les communicants de Devolver Digital. Ils étaient sans nul doute faits pour se rencontrer.

Enfin, même si les combats ne sont pas des plus compliqués, l’acquisition de deux nouvelles techniques permet de varier un peu les joutes. De plus, l’amélioration du niveau de nos capacités donne un petit intérêt à la collecte de monnaie sonnante et trébuchante, du moins plutôt éclairante puisqu’à Mojo, ce sont les ampoules qui font office de fiduciaire.  

---

…mais peut-être trop accessible

Le Vaillant Petit Page a peu de défauts. Il y a bien quelques ombres qui  « popent » en retard lors des phases en trois dimensions, mais rien qui n’entache le plaisir ludique. Le vrai défaut est, selon nous, sa plus grande qualité. Le titre se veut en effet très accessible. D’abord par un mode histoire très permissif qui se focalise sur le récit, mais aussi par plusieurs aides en jeu comme le saut automatique ou l’invincibilité par exemple. Vous me direz qu’il suffit de ne rien activer et de se lancer en mode aventure pour avoir un peu plus de challenge, mais c’est sans compter sur les interventions de Barbelune durant la majeure partie du conte. Bien souvent, nous n’avons même pas le temps de commencer à réfléchir que le mage s’invite dans la narration en nous donnant la clé de l’énigme ponctuée d’un “je dis ça, je ne dis rien”.

C’est là notre seul regret après avoir passé une dizaine d’heures pour connaître le « happy end » de notre histoire. C’est d’autant plus dommageable que l’écriture est plutôt réussie et que la voix off de François Tavares nous conte l’aventure avec brio. Outre le doublage de Thomas Burke dans Mafia III, il a également prêté sa voix à de nombreux spots publicitaires et son timbre de baryton ne vous échappera certainement pas. 

Les complétistes pourront passer une paire d’heures supplémentaires pour dénicher les 50 parchemins à collectionner ou pour trouver les dix artefacts qui se cachent dans les niveaux. Précisons que, pour ces derniers, il faudra les collecter au cours d’une seule et même partie puisque la complétion ne semble pas supporter à ce jour l’usage du choix de chapitre. 

Le Vaillant Petit Page est d’ores et déjà disponible en version dématérialisée sur PC, PlayStation 5, Xbox Series X|S et Nintendo Switch. Les amoureux du physique seront comblés dès le 21 février 2025 grâce à une édition collector, mais uniquement sur PlayStation 5 et Nintendo Switch. 

---