Connaissez-vous Maliki ? Une jeune femme aux cheveux roses, avec des oreilles et des dents pointues (elle jure qu’elle est née comme ça)… Non, toujours pas ? Et bien, vous devriez la rencontrer ! Personnage bien connu des amateurs et des amatrices de bandes dessinées, elle investit un nouveau support après le format web-comic, le livre relié et le roman. Quitter les pages pour les lignes de codes, c’est le nouveau challenge de la joyeuse Maliki, une jeune femme rageuse d’humeur taquine qui raconte une nouvelle tranche de vie dans son aventure, Poison of the Past. Une aventure que l’on va d’ailleurs découvrir au travers de notre check-up complet du jeu, la première adaptation officielle de la BD. Pas de suspense, nous allons vous montrer à quel point vous ne pourrez pas ne pas aimer.

Sous son crayon, ça gesticule à tout va
Maliki : Poison of the Past est, peut-être le saviez-vous déjà, l’adaptation en jeu vidéo d’un univers issu du monde de la bande dessinée. Née en 2004 sous la forme de web-comics, la série s’est peu à peu étoffée pour rejoindre les étales des librairies et remplir les étagères des bibliothèques. Sous les crayons de l’auteur Souillon, Maliki a donc vu le jour sur les écrans en premier lieu. Le jeu vidéo était de ce fait un « retour à la source » des plus naturels pour la jeune femme. Mais c’est quoi Maliki, au fait ? L’auteur de ces lignes l’avoue sans concession : sans la réception d’un exemplaire du jeu à la rédaction, elle aurait pu rester un personnage animé relativement anonyme à ses yeux, malgré plus de 20 ans de diffusion de ses aventures. Et quel gâchis cela aurait été…
Comment ne pas se retrouver dans le quotidien de Maliki, dans l’expression de ses traumatismes, de ses fous rires ou de ses rencontres ? Avec son look anthropomorphique empruntant des caractéristiques aux chats, on ne peut que ressentir de l’empathie et sourire à la lecture des strips dessinées par Maliki elle-même. Dans cette conception et cet univers, bien que relativement autobiographique, Souillon n’est qu’un faire-valoir, le représentant humain de ces moments journaliers racontant des tranches de vie dans un style inspiré du manga. Elle est d’ailleurs créditée de plusieurs rôles dans les crédits ! Un ton décalé qui se prête à merveille à l’exercice du jeu vidéo, tant les possibilités créatives étaient à disposition. Jeu de cartes, de plateformes, point’n click ou même de courses style Mario Kart, on aurait pu tout imaginer. C’est finalement le RPG qui a été privilégié.
Crée spécialement dans le but d’adapter la bande dessinée, le studio indépendant Blue Banshee a opté pour une narration poussée, dotée d’un gameplay aux petits oignons, dans Poison of the Past. La quinzaine de membres du studio fondé par Souillon, entre autres, s’est installé en Bretagne et a enregistré pas loin de 500 000€ de dons lors d’une campagne de financement participatif. Un véritable succès avant l’heure et un soutien qui a permis aux développeurs de produire une expérience telle qu’ils l’ont souhaitée. On le ressent assez aisément manette en main, tant les idées intégrées et le fonctionnement ne souffre de quasiment aucun défaut, n’ayons pas peur des mots. Pour un jeu indépendant proche de l’artisanat, Maliki : Poison of the Past n’a nullement à rougir et peut facilement rivaliser avec des concurrents bien mieux installés sur la scène RPG.

Village breton, compagne fidèle, ado un brin rebelle
Tout commence dans une ville tout ce qu’il y a de plus classique, avec une jeune femme flânant dans les rues. Soudain, des entités à l’apparence humaine mais végétalisées, des ronces et des plantes attaquent tout ce qui se trouve sur leur chemin. Nous voyons Sand courir pour se réfugier jusqu’à la croire perdue, écrasée par une voiture… Avant d’être protégée par une bulle figeant le temps. Un portail s’ouvre, une voix l’appelle et l’invite à traverser. Là, elle retrouve une autre jeune femme semblant la connaître et lui enjoint de combattre à ses côtés. Totalement désorientée, Sand ne fait pas le poids face à celui qui sera l’antagoniste de l’aventure, le mystérieux Poison. Tout s’arrête brusquement et le calme revient. Cette fois, Sand fait face à Maliki, dans un futur assez peu éloigné de sa réalité actuelle.
Le Domaine. C’est là que nous accompagnons notre chère Sand et sommes tout autant déboussolés qu’elle. Où sommes-nous ? Ou plutôt, quand sommes-nous ? Les prémices de réponses arrivent au fur et à mesure des premiers dialogues avec les différentes protagonistes : chacune leur tour, Maliki, Becky, Fang et Féminale cherchent à comprendre pourquoi Sand ne les reconnaît pas. Visiblement, la ligne temporelle a été rompue et modifiée. Maliki nous apprend qu’elle a volontairement fait venir Sand au Domaine dans le but de l’aider à combattre Poison. Sand ne connaît « pas encore » ses camarades, mais nous nous laissons facilement convaincre. Il faut dire que l’endroit semble charmant…
Petit havre de paix, le Domaine se présente comme une terre fertile et agricole dont la maison est le point central. On y apprend qu’il s’agit là d’un refuge sur lequel Poison n’a pas la mainmise, protégé de la faille temporelle en cours par l’Arbre aux Milles Racines et son essence. Cette même essence permettant à l’arbre de s’étendre et, par extension, d’agrandir le territoire du Domaine tout en repoussant le Mal. Une influence très « zeldaesque » qui n’est pas sans rappeler le rôle protecteur du Vénérable Arbre Mojo d’ailleurs, le chat Fëanor en plus. Véritable mascotte de la franchise, il surveille paisiblement l’arbre et a son rôle à jouer. Relativement monotone, la vie des compagnonnes va rapidement changer avec l’arrivée de Sand au sein de la troupe. Si l’on ne connaît pas son rôle et pourquoi elle a été choisie, on constate qu’elle est la seule à pouvoir interagir avec l’arbre.

Sans prévenir, ça part en vrille !
Équipée du Chronotron, un genre de sac à dos permettant de contrôler le temps, elle participe volontiers à la vie locale. Il y a dès lors trois aspects principaux qui se révèlent dans Poison of the Past : l’entretien et la préservation du Domaine, l’exploration de lieux répartis sur plusieurs époques et la maîtrise du combat. Concrètement, l’expérience type pourrait se résumer dans le fait de chercher à repousser la barrière temporelle de la base, révélant des portails qui mènent à des points stratégiques vers les apparitions de Poison dans le temps et l’affrontement avec ce dernier. Un triptyque qui fonctionne et permet de comprendre le lien que Maliki possède avec son rival. Les questions viennent naturellement au fil de l’histoire, mais Sand et ses trois amies sont là pour réparer la faille temporelle. Oui, trois, car Maliki reste sur la touche.
C’est là que repose l’originalité de la narration puisque le personnage principal, Maliki, n’est pas jouable ! À moitié masquée et possédant des caractéristiques quelque peu mystiques, la jeune femme supervise les opérations à distance grâce à Qbee, un sympathique drone à l’allure d’abeille doté d’un écran qui guide la joyeuse bande. Malgré l’absence de prise en main, Maliki n’en reste pas moins le personnage clé de l’intrigue, celle autour de qui tout repose puisque de son passé découle la rencontre avec Poison et ce qu’il a fait au monde tel que nous le connaissons. C’est là l’autre point fort du jeu, toute l’intrigue repose sur l’inscription dans le réel. Un petit village de Picardie, la ville de Paris, une forêt, la campagne… Nous sommes bien dans un bout de France transformé par un univers fantastique. Les personnages de Féminale, une fée, ou de Lady, sorte de double de Maliki en version chat sont là pour nous rappeler que la magie opère dans des lieux et des époques connus.
La bande, munie de capacités extraordinaires, part donc à l’exploration d’endroits du quotidien tels qu’une ferme ou un lycée. Chaque portail mène à ces places comme devenues « gelées » dans le temps, suite à l’intervention de Poison. Seuls les créatures sous l’emprise de votre rival végétal sont capables de mouvements, tant que vous n’aurez pas réparé la faille et ramené la vie. Entre exploration et enquête, il s’agira principalement de résoudre des énigmes en vous appuyant sur les points forts de chacune de vos protagonistes : Sand peut avancer et reculer le temps, Fang sait manipuler les objets lourds, Becky interagit avec les éléments naturels et Féminale peut connecter les plantes entre elles. Chacune peut être jouable durant ces phases durant lesquelles il faudra faire travailler ses cellules grises.

Chaton quantique, idées qui jaillissent comme des étincelles
Durant la partie d’exploration, des monstres de Poison pourront venir à votre rencontre et enclencher une confrontation. À l’instar de la plupart des RPG, les combats s’effectuent au tour par tour et peuvent être interrompus sur simple fuite. Classique. Pourtant, là encore, Maliki : Poison of the Past sait se distinguer et jouer de sa singularité. Le temps est un personnage à part entière du jeu et influe directement sur les combats. Si l’on possède le choix de lancer une attaque simple ou des techniques plus complexes, il est également possible de se mettre en position de garde défensive et de se concentrer. Cette dernière action remplit une jauge ouvrant de nouvelles possibilités inédites, permettant de faire rentrer la temporalité dans le combat !
Vous arrivez à court de points de vie ou de points de techniques ? Déplacez votre personnage au sein du continuum ! Ce faisant, elle n’est plus sur la même ligne de temps que l’adversaire et se régénère instantanément. Mais ce n’est pas tout : en bougeant les lignes, il est possible de créer des duos et de combattre simultanément à deux protagonistes pour créer des attaques en combo. Pour peu que votre gestion stratégique soit bonne, vous pourrez lancer des attaques surpuissantes et parfois bonifiées lorsqu’elles correspondent. Un atout qui donne un véritable dynamisme en combat et renouvelle quelque peu la formule classique du genre. Attention toutefois, bouger un personnage ce sont les bouger tous, ennemis compris ! Créer un duo peut aussi amener à une confrontation directe reposant sur un système proche du QTE et pouvant être fatal.
Tout reposera dès lors sur la recherche des meilleurs combos possibles et sur l’amélioration des capacités de vos jeunes aventurières. Chaque combat permet de remporter de l’expérience, amenant à des niveaux. Ces niveaux sont divisés en paliers offrant la possibilité de remporter de nouvelles techniques. En plus des aptitudes au combat, des accessoires et des modules à concevoir dans l’atelier de Fang gonfleront les statistiques et les caractéristiques de toutes. L’avantage de Maliki : Poison of the Past est cette volonté de ne pas vouloir forcer le joueur au farming excessif et à la frustration de l’enchaînement de combats mineurs pour avancer. Les développeurs ont voulu rendre l’expérience amusante et accessible, on évolue donc rapidement et sans rechigner. Il existe plusieurs quêtes secondaires pour dévier quelque peu de l’histoire principale, mais on peut venir à bout de l’intrigue autour des 15h de jeu en ligne droite.

Qui courent partout, qui font du bruit la nuit, les fanfarons
Le temps passe relativement vite en jeu, tant l’expérience est plaisante. Mais il est un point sur lequel Maliki : Poison of the Past performe particulièrement : l’aspect sonore. Dans toute sa globalité. Donner vie à une bande dessinée d’ordinaire figée n’est pas chose aisée, d’autant que Maliki n’a pas encore eu l’honneur d’une adaptation en anime TV, malgré un générique déjà prêt et chanté par le groupe Starrysky ! La bonne nouvelle vient du fait que Blue Banshee leur a de nouveau confié la mise en son de cet univers et que l’on peut dire que rarement une production indé a été autant soignée de ce point de vue technique. Les mélodies s’enchaînent et changent même légèrement leur tonalité en fonction des pièces explorées ou du temps qui passe. Une réussite totale que seuls les contributeurs de l’édition physique collector auront pour le moment la chance d’écouter sur clé USB dédiée. Pour les autres, des extraits sont disponibles sur la page officielle SoundCloud du jeu.
Ce n’est pas tout. Non seulement Starrysky habille à merveille un jeu qui semble avoir été conçu autour de leurs morceaux, mais ils sont même appuyés par le légendaire Motoi Sakuraba ! Le compositeur japonais, dont on a appris l’implication lors de la dernière cérémonie des Pégases, a crée spécialement un morceau pour le jeu. Pour rappel, on lui doit des mélodies iconiques issues de l’univers Tales of, Golden Sun, Star Ocean, Valkyrie Profile, Baten Kaitos, Dark Souls etc. Rien que de tout petits représentants du genre RPG après tout… Et vous pensiez que c’était fini ? Nous n’avons pas évoqué le doublage encore : entre les prestations de Sasha Brown (la chanteuse de Starrysky, elle incarne Sand), de Geneviève Doang (Maliki), de Jehanne Thellier (Fang), de Zina Khakhoulia (Kait dans Gears, elle incarne Becky) ou encore de Tai Wuang (compositeur de Starrysky, il incarne Poison), le jeu enregistre pas moins que la mythique Brigitte Lecordier (doubleuse historique de Dragon Ball, entre autres) pour doubler Féminale.
Un casting cinq étoiles, magnifié par la patte graphique du jeu, dont les cutscenes dessinées main sont du plus bel effet. Graphiquement, le jeu est coloré et agréable à l’oeil. On sent un hommage très prononcé à des classiques du genre comme The Legend of Zelda pour ses couleurs vives et son univers ou Pokémon pour les combats dynamiques au tour par tour. Il y aurait tellement de références à citer qu’il faudrait un article dédié ! Toutefois, cela reste suffisant pour que Maliki : Poison of the Past frappe fort dans la cour fermée des RPG de qualité. Ne manquait qu’une jouabilité aux petits oignons, que le titre n’a pas oublié d’offrir (malgré quelques imperfections) grâce à la prise en charge de la manette sur PC, pour obtenir là un véritable coup de coeur et une découverte à côté de laquelle il serait dommage de passer. Maliki : Poison of the Past est sans conteste une vraie réussite que les assidus de l’univers Maliki et les fans de RPG sauront reconnaître, tout comme les néophytes qui ne demanderont qu’à explorer toute l’étendue de ce qu’il a à proposer.








Diagnostic final
« Maliki, Maliki, jamais elle ne s’ennuie ! »
Vous vouliez un excellent RPG en ce second trimestre de l’année 2025 ? Vous l’avez : Maliki Poison of the Past a absolument tout pour plaire entre un aspect graphique accrocheur, une histoire prenante et une bande-son envoûtante. L’univers Maliki dépeint ici est absolument attachant et saura combler les amateurs confirmés de la BD qui retrouveront tous leurs personnages préférés et saura conquérir les nouveaux venus dans une histoire quelque peu détachée de l’aspect réaliste des planches, malgré tout canon dans sa chronologie. Avec seulement une quinzaine de personnalités à l’oeuvre, Maliki : Poison of the Past a tout d’un très grand jeu et mériterait clairement sa place au soleil parmi ces titres indépendants qui ont su se démarquer par le passé. Une belle réussite faite main en Bretagne. Gourc’hemennoù !
Constantes positives |
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- Un travail sonore digne d’un AAA !
- Accesible, fun et prenant !
- L’univers Maliki, attachant.
Pathologies |
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- La mini-map manque cruellement…
- Une barre de PV des ennemis serait un plus non négligeable.
- De rares imperfections dans le gameplay.
Le tampon du spécialiste
Informations complémentaires :
Type : | RPG |
Développeur : | Blue Banshee |
Éditeur : | Ankama Games |
Date de sortie : | 22/04/2025 |
Version : | Fournie par l’éditeur / Build 1.1.1 |
PEGI : | PEGI 12 : Langage ordurier |
Temps de jeu : | 15h |
Configuration PC de test :
Processeur | Intel Core i5-9300H CPU @ 2.40GHz |
Carte graphique | NVIDIA GeForce RTX 2060 |
RAM | 16 Go DDR6 |
Support de stockage | SSD 500 Go |
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