Nintendo est probablement le plus à part de tous les constructeurs de consoles. Avec une longévité record de plus de 50 années d’activité dans le jeu vidéo (sans compter celles dédiées à la fabrication de jouets traditionnels), la firme de Kyoto a su traverser les âges, parfois avec turbulences, mais sans jamais (trop) vaciller. Est-ce dû à un soutien invariable de sa communauté de fans ou à une stratégie infaillible ? Sûrement un peu des deux. Toutefois, rien n’est dû au hasard et les années passées ont prouvé que Nintendo a toujours su surprendre là où on ne l’attendait pas. À l’aune de la sortie toute proche de la Switch 2, il est temps de plonger dans les archives de la marque et de revenir sur la stratégie commerciale de Nintendo. Une stratégie unique, faite de hauts et de bas, mais un parcours qui a permis de garder la couronne du plus grand consolier de tous les temps.


Nintendo, c’est un peu le sorcier de l’industrie vidéoludique. Ce constructeur, que l’on n’attend quasiment jamais, n’a de cesse de surprendre et d’apposer son empreinte dans un marbre incassable que pourrait être le hall of fame du jeu vidéo. Une prouesse tant on connaît la difficulté de s’y installer durablement. Intellivision, Panasonic, SNK, NEC, Atari, Sega… Autant de compagnies hardware dont l’audace n’a jamais autant été récompensée que celle proposée par Nintendo et qui ont aujourd’hui disparu du paysage. Au contraire, Nintendo a su faire face à ses nombreux concurrents sans jamais trembler. Pourtant, tout n’a pas été parfait et certaines sorties de consoles ont été entachées d’erreurs industrielles de communication qui auraient pu être fatales pour d’autres. À Kyoto, on a juste traversé la tempête pour rebondir. Aujourd’hui, Nintendo a mis de côté la course à la puissance pour des expériences plus ludiques. PlayStation et Xbox ont tâté ce terrain avant de reculer prudemment. Alors, c’est quoi le secret de Nintendo ?

Nintend’origine – Une carte à jouer

Ici, nous n’allons pas nous concentrer sur l’activité pré-vidéoludique de Nintendo, mais sur son intégration au marché des consoles de salon. À la différence de Sega, son concurrent historique, Nintendo n’a pas investi immédiatement l’arcade, mais directement les foyers japonais et mondiaux. Il faut dire qu’en tant que fabricants de jouets et autres cartes de type Hanafuda, on était encore bien loin des aventures de Super Mario ou de Donkey Kong. Pour cela, il faudra attendre 1977 et la sortie de la Color TV-Game. Avec leurs variantes de Pong, ces petites machines colorées sont la première incursion de Nintendo dans le jeu vidéo. Elles répondent au désir de surfer sur la vague de hype autour de ces nouveaux jouets électroniques popularisés par Magnavox et Atari. Ici, il n’était donc pas encore question « d’âge d’or » du jeu vidéo ou de stratégie marketing pour devenir les numéro un de cette industrie naissante, mais juste une incursion discrète sur un marché en devenir qu’il ne fallait pas louper. La preuve la plus flagrante étant que certaines franchises Nintendo étaient éditées chez les concurrents, comme Mario Bros sur Atari 2600. Pour la première fois, les téléviseurs de salon étaient investis en masse. Et pourquoi ne pas viser la mobilité également ?

Ce qui a toujours caractérisé le succès de Nintendo, c’est cette double force de frappe, à la fois sur les téléviseurs et dans les paumes des joueurs. À Kyoto, on a toujours joué sur deux tableaux, et ce, dès les premiers pas de la firme dans l’industrie. Pas tout à fait consoles, puisqu’elles ne généraient pas directement des graphismes, les Game & Watch avaient tout du jouet électronique portable. Mais elles ont influencé toute la stratégie marketing de Nintendo sur le marché des consoles portables, jusqu’à la Switch… À cette époque, Nintendo visait encore à distraire un public adulte qui pourrait être occupé dans les transports, par exemple. Avec sa technologie, le jeu vidéo n’était pas encore destiné aux enfants. Pourtant, le succès de ces Game & Watch auprès des têtes blondes poussa Nintendo à revoir sa politique en termes d’audience et donna des ailes à Big N, en route pour la troisième génération de consoles. Celle qui l’a propulsé aux sommets du jeu vidéo.

Nintendoucement… – L’arrivée sur le marché des consoles avec la NES

Avant la Nintendo Entertainment System (NES) était la Famicom. En 1983, Nintendo lance la Family Computer au Japon, sa toute première machine à cartouches interchangeables ! Une manette jamais vue jusqu’alors, un catalogue riche d’exclusivités et strictement contrôlé par le fabricant, un prix relativement contenu pour l’époque (14 800 ¥, soit environ 100 €). Et si Nintendo tenait la bonne formule pour mettre les deux pieds dans l’industrie ? C’est en tout cas ce qu’ont dû se dire ses nombreux concurrents, en particulier Sega. Après un essai raté avec la SG-1000, la contre-attaque est venue de la Némésis de la Famicom, la Master System. Bien que cette dernière se soit trois fois moins vendue à l’échelle mondiale, elle a poussé Nintendo dans ses retranchements et lui a offert son premier véritable adversaire de taille. La première grande « guerre des consoles » était lancée !

Alors que la bataille fait rage au Japon, Nintendo se décide à exporter son nouveau produit phare en remodelant l’image de sa machine. Alors que la génération précédente de consoles, encombrée de multiples clones sans âme, a entraîné la chute de cette industrie dans un krach majeur aux États-Unis d’Amérique, la NES fait office de second souffle et offre la place de numéro 1 à Nintendo, dans tout le monde occidental. Le début d’une révolution de succès. Avec la NES, Nintendo tient son system-seller et lance toute une série de jeux cultes avec des accessoires solides et ergonomiques. L’expérience de fabricant de jouets paye et le pistolet Zapper ou le robot R.O.B. sont des héritages de ce savoir-faire qui va installer la marque dans les foyers du monde entier. Du côté de Sega, on rend coup-pour-coup, mais cela ne suffit pas à faire tomber Nintendo. La stratégie devient dès lors plus agressive.

Jeu vidéo, jouet, jeu vidéo… Nintendo décline ses produits cultes à l’infini ! © Nintendo

Nintend’or ! – Les années fastes de la marque avec la Super Nintendo

Beaucoup de joueurs contemporains de cette époque vous le diront : les années 1990 constituent un véritable « âge d’or » du jeu vidéo. Et ce ressenti, on le doit notamment à la bataille entre Nintendo et Sega. Un affrontement bien entendu technologique entre la Super Nintendo (Super Famicom au Japon) et la Mega Drive, qui ont fait jeu égal, mais aussi et surtout grâce à des campagnes marketing agressives et marquantes. Les années 1990, c’est l’avènement de la publicité et de tous ses excès créatifs. Nintendo l’a bien compris et a tout misé sur ses licences populaires avec des visuels forts. De marque familiale et enfantine, Nintendo devient muscle son jeu et vise désormais les adolescents. La faute probable à Sega et ses piques à tout-va, dont le fameux slogan instauré aux USA : « Genesis does what Nintendon’t« . Un jeu de mots que seule la langue de Shakespeare peut interpréter. Mais aussi un coup de génie qui force Nintendo à réagir.

La Mega Drive de Sega fut la première grande épine dans le pied du colosse Nintendo. Un concurrent redoutable qui lui aura presque fait perdre le marché nord-américain tant elle était populaire. Avec son image plus enfantine et un personnage de Mario à la bouille sympathique, il était difficile de résister au piquant Sonic, star des ados ! Là encore, Nintendo a su reprendre le dessus grâce à des licences fortes. La quatrième génération de consoles a probablement installé Nintendo parmi les plus grands et força Sega à l’essoufflement, tant le raz de marée Super Nintendo semblait inarrêtable. Appuyée par le succès interplanétaire du Game Boy et d’un accessoire permettant de lire ses jeux sur la Super Nintendo (le Super Game Boy) la firme de Kyoto paraissait tout bonnement inatteignable. C’est pourtant après ces réussites majeures que la stratégie a commencé à évoluer…

Une campagne publicitaire marquante pour la sortie de la Super Nintendo en France ! © Nintendo

Nintend’oh ! – La Nintendo 64 comme premier échec

L’histoire est connue : Sony et Nintendo n’ont pas réussi à s’entendre sur l’installation d’un lecteur CD pour la Super Nintendo. Un échec qui a conduit à la naissance de PlayStation et au retard technologique considérable qu’a pris Nintendo. Pour la cinquième génération de consoles, c’est donc une console à cartouches qui voit le jour, alors que le CD devient une nouvelle norme. Avec ce net recul technologique, Nintendo marque pourtant le pas d’une stratégie revue. Autrefois, une génération se caractérisait par la puissance de son processeur. Avec la cinquième, c’était 32 bits ou rien. Chez Nintendo, on a choisi « rien » pour sauter directement une génération ! Un choix audacieux pris après avoir mis fin au passage sur CD, mais qui n’est pas sans conséquences, puisque cela donne une image un peu vieillotte de la firme, à l’époque.

Malgré une puissance théorique plus importante, les cartouches ont moins la côte. Pourtant, quoi de plus satisfaisant que de lancer son ses Pokémons au combat dans Pokémon Stadium, grâce au Transfer Pack ? Alors que Sega s’effondre, PlayStation s’approprie la couronne de Nintendo et vend quasiment deux fois moins de machines par rapport à la génération précédente. Avec son expérience dans le cinéma, Sony n’y va pas de main morte sur le marketing et veut immédiatement s’imposer sur le marché vidéoludique. Une stratégie payante qui a rabaissé la Nintendo 64 à une console d’écoliers, quand la PlayStation était celle des « grands ». Malgré des jeux cultes, la dernière grande console à cartouches a montré deux choses : 1/ Nintendo peut vaciller et 2/ Nintendo peut en faire une force.

Avec la Nintendo 64, encore sous-titrée Ultra, la firme de Kyoto voulait revenir fort ! © Nintendo

Nintend’ordre de marche ! – La GameCube pour revenir au sommet

Avec le recul, on peut dire que la Nintendo 64 est un semi-échec commercial pour Nintendo, mais elle a révélé la plus grande force de la marque : prendre toute l’industrie à contre-pied. Ancrée dans une image de fabricant de consoles pour enfants, Nintendo devait frapper fort avec la sixième génération et lance deux machines surpuissantes : la GameCube et le Game Boy Advance. Les héritières d’une lignée royale devant reprendre un trône désormais acquis à PlayStation. La stratégie de Nintendo est donc hybride : d’abord, avec une petite console de salon originale, aux graphismes détaillés et fins, capable de rivaliser avec la Dreamcast de Sega, la PlayStation 2 de Sony et les outsiders de Microsoft, avec leur Xbox. Ensuite, par une portable boostée et connectable à la GameCube. Sur cette génération, le marché s’est considérablement réduit et laisse place à quatre mastodontes du jeu vidéo. Sega rapidement hors course, Nintendo perd son plus grand rival et sa principale source de motivation. Comme Ayrton Senna sans Alain Prost, il fallait se relever et trouver de nouveaux défis pour éviter le crash…

Las de cette image enfantine, Nintendo attaque fort dès le lancement avec un line-up beaucoup plus mature et des jeux inhabituels pour la marque avec des exclusivités fortes comme Bloody Roar, Star Wars : Rogue Squadron II ou encore Luigi’s Mansion, le premier jeu mettant en scène le « frère de », avec un soupçon d’horreur savamment dosé. Le tout est accompagné d’une campagne publicitaire qui rappelle évidemment les réclames punchy de la Super Nintendo. Avec sa forme originale et son format en mini-DVD, Nintendo joue à fond la carte cubique dans un marketing plus adulte et faisait fi de l’aspect familial prôné jusqu’alors. La GameCube pouvait largement rivaliser avec ses concurrentes, mais comme pour Sega, Nintendo aurait probablement senti la fin arriver sans un véritable changement dans sa manière de vendre ses produits. Malgré une tentative d’accrocher un public de connaisseurs avec la Q de Panasonic (une super GameCube équipée d’un lecteur DVD, sortie uniquement au Japon) et une Game Boy Micro destinée aux businessmen, rien n’y fait. L’écart avec PlayStation et Xbox devenait trop grand, il ne fallait pas moins qu’une Revolution.

La Game Boy Micro, la plus poussée de la gamme Advance et un échec cuisant malgré de nombreuses qualités. © Nintendo

Nintend’audace – La Wii, une véritable « révolution »

On a tendance à l’oublier aujourd’hui ou à amoindrir les faits parce que Nintendo jouit d’un catalogue culte sur chaque console, mais les Nintendo 64 et GameCube restent des échecs commerciaux. Non en termes de ventes, qui restent somme toutes plus qu’honorables. Mais en termes de prestige et de compétitivité : Nintendo est tombée. L’échec d’un modèle comme le Game Boy Micro, la plus avancée des Game Boy Advance, montre même une déconnexion évidente. Face à Sega, la firme de Kyoto a tenu bon, mais les arrivées successives de PlayStation et de Xbox ont changé la donne. Il fallait être réaliste : Nintendo ne pourrait plus rivaliser sur l’aspect technologique. Afin d’éviter la disparition pure et simple, Nintendo décide cette fois de prendre le contre-pied intégral, pas à moitié comme d’accoutumée. Avec la Wii, c’est une console totalement basée sur les mouvements que propose le constructeur. Grâce à sa Wiimote, une nouvelle façon de jouer était née. Une innovation majeure dans l’industrie et un retour évident au casual gaming de base. Wii, c’est we (nous, en français). Une manière implicite de dire que le jeu vidéo se conjuguera désormais au pluriel chez Nintendo. Un véritable retour aux sources ou un aveu d’échec ? Qu’importe, la formule marche : en prenant cette voie « à part », Nintendo retrouve son trône perdu.

« On fait du jeu vidéo pour enfants ? Très bien. Et on en est fiers ! » C’est en substance ce que Nintendo s’est probablement dit en lançant la Wii. Un constat simple et implacable : oui, Nintendo est une marque familiale. Ce n’est pas insultant ou réducteur, mais la voie que le constructeur a choisi de suivre pour tenir bon. Et cela fonctionne : avec plus de 100 millions d’unités vendues, la Wii est alors le plus grand succès de tous les temps pour la marque. Tandis que PlayStation et Xbox se livrent la « nouvelle guerre » graphique, Nintendo fait cavalier seul en tête. Cette stratégie est évidemment appuyée par le jeu portable et l’innovante Nintendo DS. Comme pour les consoles de salon, elle marque un retour décisif sur le créneau du fun immédiat et de l’expérience accessible à tous. La PSP de Sony était un bijou technologique, la DS un coup de génie vidéoludique ! Comme la Wii, elle rend directement hommage aux Game & Watch d’antan et propose une expérience fun à deux écrans. La septième génération a mis l’ensemble des concurrents KO. Nintendo était de retour. Avant de replonger…

Le nom de code de la Wii était Revolution. Prémonitoire tant elle a démocratisé à elle seule le casual gaming ! © Nintendo

Nintendouble écran – L’incomprise Wii U

Est-ce que la Wii était le succès de trop ? Celui qui a donné un excès de confiance à Nintendo, avant de se planter dans sa communication ? Probablement. Au point que cette console, aux nombreuses qualités, n’a clairement pas convaincu, ni trouvé son public. Il faut dire que sa présentation à l’E3 2011 est directement rentrée dans les annales d’erreurs de communication. Nouvelle console ? Simple accessoire ? Tout avait été misé sur la tablette et la console était quasi invisible du public… Il était très difficile de distinguer ce qui faisait la particularité de cette console, la première à accepter une prise en charge HDMI pour Nintendo. En réalité, toute la stratégie reposait sur le Wii GamePad, le précurseur de ce qui aura amorcé l’émergence des mini-PC et de la Switch, bien entendu. Sur le papier, la tablette offrait de belles possibilités de gameplay pour un joueur, accompagné d’autres à la Wiimote + Nunchuk. Dans les faits, l’hyper rétrocompatibilité à perdu Nintendo dans sa communication.

Les cadres de chez Nintendo se sont totalement embourbés dans leurs discours et la Wii U sort dans l’indifférence générale, faisant d’elle la console de salon la moins vendue de la marque… Pourtant, elle n’est pas dénuée de titres majeurs tels que The Legend of Zelda : The Breath of the Wild ou encore Mario Kart 8. Mais ce n’était clairement pas suffisant pour rattraper le coup : trop en retard sur son temps, mal amorcée par le constructeur… Le coup final viendra du fait que la quasi-totalité de son catalogue a été porté sur sa petite sœur, après seulement quatre ans de commercialisation. Il faut dire que le line-up de lancement était maigrichon et qu’aucun épisode en 3D de la franchise n’est venu à la rescousse de la console ! Un crime de lèse-majesté et un double échec : avec la 3DS, son binôme portable, les innovations proposées n’ont pas su convaincre. Pire encore ! Nintendo est même revenu en arrière en lançant une 2DS, faisant fi de toute technologie en relief qui était pourtant au coeur de la stratégie marketing de la marque. Une génération à oublier pour Nintendo… Enfin ,pas tout à fait. Elle a même posé les bases de la suivante !

La Wii U promettait une expérience en multi encore plus poussée grâce à sa tablette et ses nombreux accessoires. © Nintendo

Nintendouble la mise ! – La Switch, fusion entre le jeu de salon et portable

La particularité de la génération précédente vient du fait que Nintendo semble l’avoir sacrifiée sur l’autel de la facilité : la Wii U et son pendant portable, la 3DS, n’ont pas pu justifier à elles seules de s’offrir ces consoles. Plus améliorations que réelles évolutions, elles arrivaient en bout de course d’un système en binôme qui durait depuis trop longtemps. Et quand Nintendo est au fond du trou, c’est là que l’entreprise sait surprendre le mieux. La fusion entre console de salon et console portable. La dernière idée de génie qu’a eu Nintendo grâce à la Switch. L’accueil est immédiatement positif. À cheval entre deux systèmes, elle se paye même le luxe de revenir à la cartouche ! Elle perd de facto sa capacité de rétrocompatibilité, mais elle introduit une nouvelle forme de jeu en phase avec son époque : hybride. Évidemment, elle n’est pas capable de rivaliser techniquement avec les PlayStation 5 et Xbox Series X|S, mais son intérêt est ailleurs.

La Switch, c’est le passage à l’ère moderne pour Nintendo : un eShop remodelé et actualisé, un programme en ligne fiable avec un catalogue de jeux rétro accessible, l’accès à quasiment tous les titres de cette génération et, bien entendu, les exclusivités Nintendo qui vendent à elles seules les consoles. Cette fois, Nintendo a contenté tout le monde : les familles qui jouent au salon, l’adulte adepte de technologie avec la version OLED et les jeunes avec une version 100% portable, la Lite. Une formule évidemment gagnante qui se confirme dans les chiffres, puisque non seulement la Switch est la console Nintendo la plus vendue de tous les temps, mais elle est même en passe de devenir la console de salon la plus vendue de l’histoire. Une prouesse aussi remarquable que la longévité de la machine, huit ans. Là encore, Nintendo a poussé la voie de la différence à fond et le résultat est payant. L’innovation et l’audace sont les marqueurs de réussite pour cette compagnie historique. Est-elle encore prête à surprendre avec la Switch 2 ?

La Switch, fusion parfaite entre jeu mobile et de salon ? © Nintendo

La Switch 2, dans la continuité de la stratégie de Nintendo ?

La Switch 2 est disponible depuis le 5 juin 2025 et poursuit l’héritage de Nintendo : à savoir qu’une génération sur deux passe à la trappe. On l’a vu, depuis la GameCube et l’arrêt de la course à la toute-puissance, la firme de Kyoto ne parvient jamais à convertir deux succès d’affilée (économique comme populaire), comme à l’époque de l’enchaînement Nintendo/Super Nintendo. En effet, depuis la sortie de la Wii, chaque génération suivant une réussite parait dessiner un échec. La Switch 2 ne déroge à la règle entre son prix jugé exorbitant, le portage d’un nombre conséquent d’exclusivités et de titres tiers de la génération précédente, des graphismes forcément inférieurs à ceux que l’on trouve chez PlayStation ou Xbox, une augmentation drastique des prix des jeux, des fonctionnalités peu claires comme la cartouche virtuelle… Bref, cette console n’a pas encore convaincu et l’enthousiasme autour de sa sortie semble tiède. Alors, à quoi joue Nintendo ?

Assistons-nous vraiment à des incidents industriels de communication ou bien à une stratégie maîtrisée ? Dans la première option, on pourrait tout simplement penser que Big N se repose sur les lauriers du succès précédent et ne voit pas d’intérêt majeur à innover sur chaque génération. Ce serait de l’excès de confiance, tout au plus… On peut prendre pour exemple des cas concrets comme la Game Boy Micro ou la Wii U, qui illustrent parfaitement l’idée que le succès donne des ailes à Nintendo, quitte à fâcher (momentanément) son public. La seconde option est, en revanche, bien plus intéressante. Pourrait-on imaginer que Nintendo « sacrifie » volontairement une génération au détriment d’une autre ? Et pourquoi pas ? Après tout, cela aurait du sens : après un succès majeur, il n’est pas évident de réitérer l’exploit.

Certains rétorqueront que PlayStation y parvient parfaitement. C’est partiellement vrai : chez Sony, l’innovation n’est pas au cœur de la stratégie et chaque PlayStation garde malgré tout une structure relativement semblable à la précédente. Il aura fallu quatre générations pour enfin changer la DualShock. Xbox opère également de cette manière en gardant la même interface et le même contrôleur d’année en année. Chez Nintendo, c’est différent. Si la Wii et la Wii U vont de pair, la Switch 2 emprunte forcément cette même voie avec sa grande sœur. Améliorer la génération suivante sans innover davantage permet de ralentir l’industrie et de préparer la future, à venir. Après les deux échecs commerciaux que Nintendo a connu sur le duo Nintendo 64 et GameCube, la firme a vacillé.

La Switch 2 conjurera-t-elle le sort de la deuxième génération sacrifiée ? © Nintendo

Elle a vu son rival de toujours, Sega, disparaître sous ses yeux. Chez les « bleus », on pourrait dire qu’un excédent de précipitation et un manque d’étude du marché a entraîné la chute brutale, après la Dreamcast. Nintendo veut probablement s’accrocher et ne pas répéter cette erreur. Quitte à sacrifier volontairement une génération après un succès majeur ? Oui, c’est une possibilité qui laisserait le temps à Big N de peaufiner la suite, du genre qui peut bouleverser l’industrie. Si la Nintendo 64 et la GameCube prenaient partiellement le contre-pied de l’industrie, elles n’en restaient pas moins des concurrentes sérieuses dans la course à la technologie. Sur ce point, Nintendo a perdu la bataille depuis de nombreuses années. Depuis la Wii, chaque console signée Nintendo a snobé la concurrence, au point de les inspirer : le casual gaming est devenu une norme que les PS Move, PS VR et autres Kinect n’ont jamais su imiter.

Le jeu tactile de la Wii U a su s’exporter sur les tablettes et même les manettes DualSense de la PS5. La flexibilité de la Switch a poussé Microsoft a développé son offre Xbox Game Pass sur tous les écrans possibles, tandis que les micro-PC portables (Steam Deck, Rog Ally etc.) sont des copies ergonomiques de la dernière de Nintendo. Quel sera l’apport de la Switch 2 ? Elle part, comme la Wii U avant elle, avec un léger handicap d’enthousiasme modéré. Il faut dire que Nintendo la présente officiellement comme une évolution de la Switch sur son store… Mais comme ses grandes sœurs, il ne fait aucun doute qu’elle saura inspirer ses concurrentes avec ses fonctionnalités, quand bien même elle ferait la course à part. Et cela, c’est un jeu que maîtrise parfaitement Nintendo.

Toute la force de Big N repose bien au-delà d’une escalade technologique qui a dominé le marché durant plusieurs décennies. Ce combat-là, Nintendo l’a mis de côté depuis bien longtemps. Reste que les foyers se disent bien souvent prêts à s’équiper d’une PlayStation ou d’une Xbox, selon préférence, mais qu’une Nintendo devient la console secondaire à avoir. Une Nintendo et… une autre ! Nintendo gagne dans tous les cas le coeur des foyers et offre un raisonnement devenu indispensable pour ne pas passer à côté de tout ce qui fait le charme de ces machines si spéciales. Oui, elles sont moins performantes techniquement parlant, et ce, depuis plusieurs générations, mais nul doute que la Switch 2 sera bien sous le sapin avant les prochaines PlayStation ou Xbox. Nintendo a (encore) un coup d’avance.

Nintendoes what other don’t


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